Quelle est la relation entre
la mauvaise qualité de l'air intérieur
et
la santé allergique et respiratoire des
enfants des écoles françaises?
Introduction
L'équipe
Epidémiologie des Maladies Allergiques et Respiratoires (EPAR) d'Isabella
Annesi-Maesano[1],
vient de publier dans la revue Thorax les résultats de son étude sur la qualité́
de l'air à l'intérieur de 108 écoles primaires réparties dans 6 villes françaises.
Bien que la qualité de l'air intérieur varie en fonction des écoles et des
villes, les chercheurs révèlent qu'environ 30% des 6590 enfants suivis, soit 3
enfants sur 10, sont exposés à des niveaux des principaux polluants atmosphériques
supérieurs aux valeurs guides recommandées par l'OMS et l'ANSES.
Les
enfants sont plus sensibles aux effets de la pollution de l'air que les
adultes. La pollution de l'air intérieur peut entrainer chez les enfants des problèmes
de santé à court et à long terme tels que :
·
des
irritations de la peau et des yeux,
·
des réactions
allergiques,
·
de l'asthme,
·
des maux de tête,
·
de la fatigue,
·
des vertiges
ou encore des nausées.
Dans
les pays industrialisés, les enfants passent environ 80% de leur temps à l'intérieur, dont une grande partie à l'école. Bien que des données américaines soulignent une
pollution de l'air intérieur accrue dans les établissements scolaires, les relations entre cette qualité de l'air intérieur des écoles, la santé allergique et respiratoire des enfants
scolarisés n'ont été que peu explorées.
C'est
pourquoi l'équipe EPAR d'Isabella Annesi- Maesano, a mené́ une étude dans six
villes de France (Bordeaux, Clermont-Ferrand, Créteil, Marseille, Strasbourg et
Reims) sur un large échantillon de 401 classes dans 108 écoles primaires.
L'objectif
de l'étude consistait à évaluer l'exposition de 6590 enfants concernés,
garçons et filles âgé(e)s de 10 ans en moyenne, aux principaux polluants
atmosphériques des classes et à analyser le lien avec l'asthme et les rhinites
développées par les enfants scolarisés dans ces classes.
L'étude
montre que 30% des enfants sont exposés à des niveaux de polluants de l'air intérieur
des classes supérieurs aux valeurs guides de l'OMS et de l'ANSES[2], soit
en moyenne 3 enfants sur 10, bien qu'ils n'y soient pas exposés de la même manière.
"L'intérêt de notre étude est de disposer de données sur un
nombre important d'enfants répartis sur l'ensemble des régions de France métropolitaine",
explique Isabella Annesi- Maesano.
Les
chercheurs ont analysé pendant une année scolaire les concentrations de différents
polluants atmosphériques:
·
les particules
fines de diamètre inférieur à 2,5 micromètres (PM2.5),
·
le dioxyde
d'azote (NO2)
·
3 aldéhydes (formaldéhyde,
acétaldéhyde et acroléine).
Les
particules fines et le dioxyde d'azote (NO2) proviennent essentiellement de la
combustion automobile et peuvent rentrer par transfert (en ouvrant les fenêtres)
à l’intérieur des locaux par exemple.
Les
aldéhydes sont des polluants intérieurs issus de nombreuses sources:
· produits
de combustion (cigarette, bougies, encens, cheminée, cuisinières à gaz),
·
de
construction
·
de décoration
(bois, parquets stratifies, des colles de moquettes, des papiers peints,
·
mais également
des vernis, des mousses isolantes),
·
d'entretien (détergents,
désinfectants, lingettes)
·
le traitement
(insecticides)...
En parallèle, l'équipe de recherche a étudié les
signes cliniques des enfants grâce aux données recueillies lors d'une visite médicale
comportant aussi un test cutané́ aux 11 allergènes les plus communs (acariens,
chat, pollens...) et un test d’exercice permettant de détecter l'asthme à
l’effort. Ces données ont été complétées par un questionnaire rempli par les
parents.
"L'exposition à des concentrations élevées de
particules et composés organiques volatils est associée à une augmentation de
la prévalence des signes cliniques de l'asthme et des rhinites chez les enfants
scolarisés. Les enfants sujets aux allergies semblent les plus à risque",
révèle la chercheuse.
En détails, les résultats montrent que les rhinites
(en particulier les rhino conjonctivites) sont associées de manière
significative à des taux forts de formaldéhydes dans les classes.
Et qu'une augmentation de la prévalence de l'asthme
est observée dans les classes avec des taux élevés de particules fines PM2.5,
de formaldéhyde, d'acroléine.
La relation entre la mauvaise qualité́ de l'air et
l'asthme concerne le plus souvent l'asthme de type allergique défini par le
test cutané́.
"La mauvaise qualité de l'air intérieur
pourrait à terme détériorer la santé allergique et respiratoire des enfants
qui passent en moyenne 8h par jour à l'école. Il est donc important de
maintenir une bonne qualité́ de l'air en classe. Cela permettrait de limiter
les risques de développer les signes cliniques des rhinites et de l'asthme.
Cette action doit être accompagnée par une surveillance stricte de l’exposition
des enfants aux polluants à la maison et à l'extérieure "
conclut l'équipe
de recherche.
[1] Elle est la directrice de recherche Inserm dans l'unité
de recherche 707 "épidémiologie, systèmes d'information,
modélisation" (Inserm/UPMC)
[2] Particules fines
(PM2.5) : 10μg/m3 selon l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) Dioxyde
d'Azote (NO2) : 40μ/m3 selon l'OMS
Formaldéhydes : 10μg/m3 par an selon l'Agence nationale de sécurité
sanitaire, de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES)
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